Quand la quantité écrase la qualité : l'éducation française face à ses limites

33 heures de cours par semaine et peu de moyens : au lycée, la quantité prend le dessus sur la qualité. L’éducation, autrefois symbole du soft power français, peine à évoluer face à de nouveaux modèles qui font leurs preuves. 

Quand la quantité écrase la qualité : l'éducation française face à ses limites
Photo by Taylor Flowe / Unsplash

Quand les heures prennent le dessus...

Pour un lycéen de 1ʳᵉ en France, la semaine de cours obligatoire est de 29 h 15*. À ce chiffre peut s’ajouter une ou plusieurs options : une classe Euro (+2 h) ou une option facultative comme le Latin ou le Cinéma (+3 h). Rapidement, le temps passé à l’école rivalise avec un travail à temps plein. Et ce total n’inclut pas les devoirs, temps de transport, révisions ou projets personnels.

Comparativement, la moyenne européenne est plus faible. Selon l’OCDE, les élèves français passent plus de temps en classe que leurs voisins européens, sans que cela se traduise par de meilleurs résultats : les scores PISA 2022 restent moyens. En Finlande, par exemple, les lycéens suivent environ 20 heures de cours par semaine, avec davantage d’autonomie et de projets pratiques. Malgré des horaires plus légers, ils figurent parmi les meilleurs d’Europe en lecture, mathématiques et sciences.

Cette surcharge a aussi un impact sur la santé mentale. Les adolescents français figurent parmi les plus stressés d’Europe : la combinaison de longs horaires et de pression scolaire aggrave le phénomène. Un élève stressé assimile moins bien et perd en motivation, ce qui va à l’encontre de l’objectif initial : réussir.

*Selon nos calculs (chiffres de l'Education Nationale) :
- 17h15 de tronc commun : 4h de français, 3h d'histoire géographie, 4h30 LVA + LVB, 2h EPS, 1h (une semaine sur 4) d'EMC, ES 2h, 1h30 Mathématiques Spécifiques (sauf pour ceux ayant la spécialité Mathématiques)
- 12h d'enseignements de spécialités : 3 x 4h

... Mais que les moyens ne suivent pas

La question des moyens alloués à l'école est primordiale. On entend régulièrement des politiciens parler d'un budget énorme, souvent qualifié du "plus important de l'Etat".

Dans un article récent paru dans Le Monde, ainsi que sur ces graphiques réalisé par le créateur de contenu et vulgarisateur @vivremoinscon, on se rend compte d'une autre réalité, moins mise en avant :

Les chiffres ici concernent les cycles primaires de l'éducation, et peuvent ne pas être représentatifs des budgets des cycles secondaires.

@vivremoinscon

Dans ce premier graphique, la France (en Rouge) dépenserait environ 10 000 $ PPA (parité des pouvoirs d'achat, dollar ajustée pour prendre en compte les différences de valeurs des monnaies entre les Etats) pour un élève de primaire. La moyenne européenne (en bleu ici) se situerait autour de 11 000 $ PPA. Mais le plus marquant, la Norvège, ayant d'excellents résultats PISA, avoisinerait les 17 500 $ PPA. Soit 75% plus que la France.

Sauf que, on a récemment appris dans un papier publié par Le Monde, que ce chiffre de dépense publique française dans l'éducation est artificiellement gonflé... par les cotisations retraites des enseignants. Ces cotisations ne financent absolument pas l'éducation. Alors une fois corrigé, les chiffres sont encore plus alarmants :

@vivremoinscon

Autre constat, les enseignant-es du primaire sont payés en moyenne 1000 $ PPA en moins que la moyenne des pays de l'OCDE. Et même 2 fois moins que leurs collègues allemands ou autrichiens :

@vivremoinscon

En Allemagne, en 9e Klasse (soit l'équivalent de la classe de seconde), les élèves se retrouvent dans des classes autour de 25 élèves (variable en fonction du Länder et de l'établissement), en France, c'est 35.

En France, pour de nombreux établissements, l'insalubrité est devenue monnaie courante. Etudier à Guist'hau c'est déjà profiter d'un certain cadre favorisé, qui n'est malheureusement plus une généralité pour chaque lycéen-ne français-e.

Malgré des semaines de cours bien plus longues que celles de nos voisins européens, les résultats scolaires restent inférieurs. Et si certains dénoncent des "dépenses excessives” dans notre système éducatif, la réalité est tout autre : les moyens manquent là où ils comptent vraiment.

Une population éduquée, c’est une population à forte valeur ajoutée. L’éducation est un investissement sur l’avenir, mais en France, nos politiques semblent privilégier le court terme au détriment du futur. L’éducation ne devrait jamais être une question de moyens. Multiplier les heures de cours ne remplacera jamais l’investissement réel nécessaire pour apprendre.

Sources :

« Le budget de l’éducation nationale est artificiellement gonflé »
Les débats sur la dépense d’éducation, souvent jugée trop élevée, sont biaisés par les règles de calcul de la retraite des fonctionnaires d’Etat, juge l’économiste Julien Grenet.
Vivre Moins Con (@vivremoinscon) • Instagram photos and videos
417K Followers, 1,408 Following, 376 Posts - See Instagram photos and videos from Vivre Moins Con (@vivremoinscon)